8.5/10Dindons & Dragons

/ Critique - écrit par Guillaume, le 08/01/2004
Notre verdict : 8.5/10 - Troll’ment bon! (Fiche technique)

Hum... Ce titre, c'est pas un peu ridicule ?

Dès le premier coup d'oeil envoyé à la boîte de jeu minuscule (taille étui de jeu de 52 cartes carrées) on comprend le parti-pris de l'auteur. Tout du moins si on est un minimum rôliste (joueur de jeu de rôle). Le titre et le design de couverture sont explicites. Dindons & Dragons est une référence directe au jeu de rôle Donjons & Dragons, l'ancêtre de tous les jeux de rôle.
Mais là, de jeu de rôle, aucun, enfin si, si on peut dire. Pas de feuille de personnage, pas d'histoire à inventer ni à vivre. Mais on joue un rôle. Tous les participants jouent un rôle. Nous sommes des Trolls. Et comme toutes les créatures de ce type, nous ne cherchons qu'une chose. Nous bâfrer ! Là est le but du jeu : faire une brochette d'aventuriers ; la plus grande possible, et surtout la mieux assortie, accompagnée de quelques pintes de bières (non fournies avec le jeu comme il est si savamment commenté dans les règles).

Les Trolls font une ronde et piochent chacun une carte gibier préféré parmi les sept disponibles. Ils la regardent discrètement en faisant attention au regard louche du voisin qui pourrait ruiner la suite du jeu, et les posent devant eux faces cachées. Les cartes gibiers préférés restantes sont sorties du jeu, sans être vues, afin de préserver l'intégrité de la surprise que tout bon troll se doit de respecter.
Un troll, désigné au hasard (ou sous la vindicte populaire si jamais vous n'avez pas de dés sous le coude... ce qui est fort probable vu qu'il n'y en a pas dans la boîte... en même temps, c'est pas du 421, donc c'est plutôt normal) place au centre du cercle une carte aventurier par troll présent. Ils les retourne puis les replace faces invisibles. La partie peut commencer ! Hop, regardez la rouge, vous voyez elle est là ! Hop, hop, hop ! Et non, elle n'est plus là... C'est le bonn'troll (le bonneteau si sympathique auquel vous perdez toujours quand vous faites des parties dans les rues). Chacun essaie de suivre la carte qui l'intéresse, peine perdue si comme dans les règles vous buvez (avec modération évidemment) votre bière en jouant. Ensuite, le troll à la gauche du bonn'trolleur commence à chasser, c'est à dire qu'il sélectionne une carte au centre. Puis le troll suivant fait de même ,et ainsi de suite. Tous les trolls retournent les cartes tirées puis appliquent les pouvoirs de chaque aventurier. On cache toutes les cartes, sous forme de brochettes. Et on recommence jusqu'à épuisement du paquet.

A la fin de la partie, chaque troll compte son nombre de Gépés. Celui qui en a le plus gagne. Il est nécessaire d'avoir avant tout plusieurs exemplaires d'aventuriers identiques. Principalement ceux correspondant à son gibier préféré.

Un peu simple tout ça ? En effet, un peu... mais c'est sans compter les pouvoirs de chaque aventurier qui s'exprime après la chasse. Le jeu en est complètement changé car ça incite les trolls à faire preuve de stratégie, et même de tactique. Evidemment un troll qui réfléchit ça ne se voit pas tous les jours... Mais pour gagner, c'est la seule solution ! Les trolls vont utiliser les pouvoirs de leurs proies :

-le barbare : grâce à lui on échange un aventurier de sa brochette contre l'un d'une brochette adverse.

-le dragon : il vole jusqu'à la brochette d'un troll adverse et chipe un aventurier.

-la magicienne : elle permet, juste avant la chasse, de choisir l'aventurier que l'on veut en procédant à un échange. Le tout se déroulant face visible !

-la voleuse : après le bonn'troll, elle se fait un plaisir d'échanger un aventurier de sa brochette contre l'un de ceux au centre, face cachée !

-la rôdeuse : au cas où le bonn'troll serait ardu, elle permet de voir une des cartes après le mélange.

-le paladin : il a une vision partielle des aventuriers de la brochette d'un troll adverse.

-le prêtre : il décide qui va procéder au prochain bonn'troll, votre voisin de droite sans doute !

-le dindon : pas très drôle, il oblige à céder un aventurier de sa brochette à l'un de ses ennemis trolls. Sauf si l'on n'a (ou que l'on fait croire que...) que des dindons dans sa brochette.

-l'aubergiste : le boulet du tas, il n'a aucun pouvoir !

In bierum verita !

Après quelques chasses de chauffe on s'habitue au mécanismes et la révélation arrive. Dindons & Dragons, joue fun ! Dindons & Dragons joue intelligent ! Elaborer des stratagèmes à l'aide de ciseaux d'or pour se retrouver contré en une seconde par la grosse hache du barbare... ça ne fait jamais plaisir. L'intérêt du jeu réside autant dans les illustrations fort jolies des cartes que dans la réflexion et les moments de fous rires. Le mélange entre jeu de stratégie et jeu de mains (jeu de vilains ! oups, pardon, je m'égare) équilibre parfaitement un jeu très agréable dont l'issue est toujours incertaine.

A peine distingue-t-on certains déséquilibres, qui sont en même temps des défauts et des qualités. Avoir comme gibier préféré le dindon, c'est vraiment handicapant, on passe une partie fort peu instructive. Avoir comme gibier le dragon et c'est la puissance assurée. Enfin, au départ ! Ensuite, quand tous les trolls ont saisi les ficelles du jeu, Dindons & Dragons prend une autre dimension, où les pouvoirs ont largement leur place. Et on se surprend à échanger des éléments de brochettes, non pas pour compléter la sienne, mais plutôt pour ruiner celles des autres.

Au final, Dindons & Dragon est un jeu complet, distrayant et intelligent qui comblera un grand nombre de soirée en apportant une touche de fun !